A propos

L'intelligence économique à l'ordre du jour présidentiel

Le président de la République Emmanuel MACRON a confié la rédaction d'un rapport sur la prédation technologique opérée par les puissances étrangères à l'ancien patron du MEDEF

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La mission de sécurité économique confiée à Geoffroy Roux de Bézieux

Ce dernier se voit confier cette mission de sécurité économique dans un contexte d’offensives économiques de plus en plus nombreuses de la part des États-Unis et de la Chine sur les entreprises françaises. À l’œuvre sur la question de l’intelligence économique depuis son arrivée au MEDEF, entérinée par le lancement du comité de souveraineté et de sécurité des entreprises françaises inauguré en février 2019, Roux de Bézieux est désigné par le président Macron sans surprise. Son rapport sera livré dans six mois et ne sera pas rendu public. En effet, tandis que Pékin multiplie les techniques d’espionnage, les États-Unis s’impliquent activement dans le rachat des entreprises stratégiques françaises, ou tout du moins s’y essayent. Dernier exemple en date, la tentative de rachat, par l’américain Flowserve, des entreprises Segault et Velan SAS, spécialistes en robinetterie nucléaire, servant notamment à équiper les chaufferies nucléaires des sous-marins lanceurs d’engins et du porte-avions Charles de Gaulle, a été empêchée de justesse par le véto du ministre de l’Économie et des Finances

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L’espionnage de la Chine, des universités aux entreprises françaises

La prédation informationnelle chinoise « se constate également dans les domaines de la recherche et de l’innovation, notamment dans le milieu universitaire » rapporte l’École de Guerre Économique (EGE) : l’exemple de l’affaire Valéo en 2005 y est présenté comme le « premier coup d’éclat » de cette prédation. Dans cette affaire, une étudiante chinoise de l’Université de Compiègne, alors en stage dans l’usine de Guyancourt (78), chez qui sont retrouvées des informations stratégiques de l’entreprise, incluant des documents sur des futurs modèles, qu’elle a transmis en Chine par messages codés, retrouvés sur sa boîte mail. Autre exemple, évoqué dans l’ouvrage d’Antoine Izambard, publié en 2019 : France Chine, les liaisons dangereuses, le nombre important de mariages entre des étudiantes chinoises et militaires français dans la région de Brest. Il dénonce au passage le rôle majeur des instituts Confucius, relais d’influence pour le pouvoir chinois sur les universités françaises.

Du rapport Martre au rapport Gattolin : rétrospective des 30 dernières années

En 2003, le rapport du député Bernard Carayon « Intelligence économique, compétitivité et cohésion sociale » listait 38 propositions réparties en 6 chapitres : il y était déjà question de la compétitivité de la France et des entreprises françaises, de la création d’un Conseil National pour la Compétitivité et la Sécurité Économique (CNCSE), de la défense économique, de la sécurité économique active, de la politique d’influence, de la formation à l’intelligence économique, et de son application territoriale. Le tout pour une « vraie et grande politique publique en termes de défense et de sécurité économique ». Près de 20 ans plus tard,le rapport d’activité annuel de la Direction Générale des Entreprises (DGE) publié en janvier 2023 fait quant à lui état de 600 menaces étrangères visant les entreprises françaises sur l’année 2022. La Direction Générale du Trésor s’inquiétait déjà dans un rapport de mars 2022, d’un bond de 31% du contrôle des sociétés sensibles en 2021, notamment dans le secteur des biotechnologies. En conséquence, la mission confiée à Roux de Bézieux s’inscrit ainsi dans la continuité des actions entreprises depuis près de 30 ans. Trois décennies pendant lesquelles la prédation étrangère s’est intensifiée au gré des nouvelles techniques d’influence, de manipulation de l’information et d’ingérence économique, facilitées par l’évolution des technologies, la mondialisation du commerce et bien sûr, l’essor d’internet, sans frontières numériques.